Mercedes-Benz Viano Monospace

De tous les véhicules particuliers signés Mercedes-Benz, le Viano est le seul à signifier de manière ostentatoire la noblesse de sa mécanique. "V6" : deux caractères qui en disent long sur celui des aficionados de cet utilitaire fait limousine.

Une Classe E ne le crie pas sur tous les toits, pas davantage qu'une S ou qu'un ML. Même la modeste Classe C ne se fait pas vantarde lorsqu'elle en reçoit un. Pourquoi le Mercedes Viano aurait-il le droit de clamer haut et fort qu'il a droit à un moteur six-cylindres ?

Si le constructeur allemand tolère ce petit péché d'orgueil, c'est parce que son grand "monospace" (sic) souffre d'un complexe d'infériorité, trouble très fréquent chez les utilitaires promus au rang de voiture particulière. Voyez son concurrent, le Volkswagen Transporter : ce compatriote insiste pour qu'on l'appelle Multivan lorsqu'il charge des passagers plutôt que des marchandises. Voire Caravelle lorsqu'il courtise les familles plutôt que les chefs d'entreprise. Et encore California lorsqu'il campe en bord de mer plutôt que le long des quais de chargement. Un engin schizophrène !

Le Viano n'est pas moins coquet. En affichant fièrement un "V6" chromé à sa boutonnière, ce Vito amélioré cherche à gommer ses racines utilitaires en rappelant qu'il n'a pas grand-chose à envier aux berlines de la marque à l'Etoile en termes de raffinement mécanique. Car si les fourgons Vito et Sprinter sont devenus la hantise des automobilistes qui lambinent sur la voie de gauche, c'est en partie grâce à leur V6 Diesel 3 litres"type OM 642" de 224 chevaux, celui-là même qui anime les berlines Mercedes C 320 CDI, E 320 CDI et S 320 CDI. Une mécanique onctueuse et vigoureuse, parfaitement épaulée par une transmission automatique "à l'ancienne", éprouvée sur des millions d'utilitaires.

Il n'en faut pas moins pour satisfaire la clientèle ô, combien exigeante des professionnels. Qu'importe si cette dernière formule parfois des souhaits qui ressemblent à des caprices aux yeux des particuliers : Mercedes-Benz y accède de bonne grâce en gardant à l'esprit que le entreprises ne regardent pas à la dépense lorsqu'elles doivent investir dans un outil à leur mesure. Ce que client veut, client reçoit.

L'exemple du badge "V6" est révélateur. S'il importe peu à un chauffeur de taxi de faire savoir qu'il roule en berline à moteur quatre ou bien six cylindres, le gérant d'un hôtel cinq étoiles en revanche tient à garantir à sa clientèle qu'elle voyage à bord du nec plus ultra des navettes. Le lustre de l'Etoile à trois branches associé à un petit "V6" innocent affiché négligemment sur les flancs d'un Viano d'un noir immaculé font beaucoup pour le prestige d'un établissement.

D'aucuns diront que le VolkswagenMultivan Highline n'a pas grand-chose à envier au Mercedes Viano Monospace. Il est vrai que ses fauteuils en cuir flattent tout autant la rétine et qu'ils coulissent librement sur des rails, à l'instar de ceux du Viano. En revanche, le VW ne compte que sept places au maximum, contre huit pour le Mercedes (ou sept, ou six, au choix). Et si ce dernier dispose de deux cent vingt quatre chevaux, le Volkswagen n'en a que cent quatre vingt à donner. Encore s'agit-il là d'un vulgaire 4-cylindres !

Le Viano l'emporte donc haut la main sur son concurrent en termes d'image. C'est lui que les grands hôtels choisissent de préférence, tandis que sa variante plus modeste Vito Shuttle est affectée au transport du commun des mortels. Viano et Vito portent le même nom de famille mais ne sont décidément pas du même monde...

Les avantages du 6-cylindres ne s'arrêtent pas là. Le Mercedes Viano CDI 3.0 s'avère sensiblement plus agréable à conduire que son petit frère CDI 2.2 dont le moteur 4-cylindres OM 651 de 163 chevaux est à la fois moins vigoureux, moins alerte et moins discret. Il s'agit là d'un euphémisme, car même s'il bénéficie d'une insonorisation renforcée depuis son tout récent restylage, le Viano n'en reste pas moins un engin bruyant qui rivalise difficilement avec les grands monospaces de type Renault Espace et Ford Galaxy. La faute à cette immense carrosserie qui fait caisse de résonance et génère beaucoup de turbulences aérodynamiques.

De même, un engin aussi lourd et aussi haut qu'un Viano ne saurait se jouer des lois de la physique avec la même impunité qu'une petite Classe C. Entre roulis en virage, tangage sur les longues ondulations, plongée au freinage et tressautements sur mauvais revêtement, on sent le Viano loin de l'excellence d'un Grand Espace. Tout est relatif cependant. Seul l'automobiliste peu familiarisé avec le genre "camionnette" s'alarmera des mouvements incessants de la caisse : d'une part le VW Multivan ne fait pas mieux, d'autre part les professionnels qui passent leur journée au volant d'un fourgon Vito sauront apprécier le moelleux offert par les amortisseurs et les ressorts spécifiques du Viano.

Quoi qu'il en soit, on s'habitue très vite aux réactions du Viano, d'une agilité surprenante au regard de son gabarit. On apprécie l'excellente position de conduite qui permet d'avaler les kilomètres sans trop souffrir d'une pédale de frein trop élevée, vite pénible dans les encombrements.

Le conducteur aura par ailleurs la grande satisfaction de savoir que ses passagers sont tous logés à la même enseigne, à la différence de maints monospaces qui sacrifient ceux du fond. Les sièges sont identiques en seconde comme en troisième rangée, et même si leur assise ferme et un peu trop plate finit par fatiguer le séant, leur dossier inclinable fournit un soulagement appréciable pour le dos. Surtout, chaque passager aura de quoi caser ses pieds, bien à plat pour les plus grands. Aucun monospace ne peut en dire autant.

Voilà qui nous amène à la raison première de s'offrir un Viano. Quoique imposant, sinon intimidant, l'engin n'est pas réservé aux gérants d'hôtel ni aux chauffeurs de voiture de place. Le bon père de famille peut lui aussi choisir de rouler dans un véhicule sûr, confortable et suffisamment vaste pour accueillir huit personnes et leurs bagages. Les lassés de la remorque bagagère et les réfractaires au coffre de toit savoureront ce luxe à sa juste valeur.

"Les particuliers assurent près de 25 % de notre clientèle", revèle Anne-Lise Castel, en charge du pilotage des ventes utilitaires légers chez Mercedes-Benz France. "Pour les familles de trois enfants et plus, l'offre reste limitée. D'un côté, avec les grands monospaces, c'est passagers ou bien bagages, mais pas les deux. De l'autre, avec les dérivés de fourgons utilitaires de la concurrence, on sacrifie son confort."

Image © Mercedes-Benz

Une chose est sûre, cependant : le Mercedes-Benz Viano n'est pas destiné aux budgets modestes. Encore qu'un Renault Grand Espace long de 4,86 m ne soit pas donné non plus : de 35.900 euros avec un 4-cylindes Diesel de 130 chevaux à 52.900 euros avec un 4-cylindres de 175 chevaux. Le Viano Monospace "compact" (10 cm plus court que le Renault) démarre quant à lui à 33.970 euros (2 litres de 136 ch) et grimpe jusqu'à 58.000 euros en version V6 CDI 3.0 Avantgarde automatique. Ajoutez 750 euros pour passer à la version longue, et encore 750 euros pour la version extra-longue (5,01 m et 5,24 m respectivement).

Comme souvent, la version d'entrée de gamme ne sert que de prix d'appel. Ce Viano Monospace "Function" (uniquement en "compact" ou "long") est très peu diffusé, "car il ne se distingue que trop peu de la version Shuttle du Vito", confesse Anne-Lise Castel. "La majorité des clients du Viano exigent un équipement plus fourni et une apparence plus soignée, histoire de s'éloigner le plus possible du Vito jugé d'allure trop utilitaire". Comprenez par là qu'un Vito Shuttlesera plus indiqué pour le transport des poussins crottés du club de foot. Tandis qu'un Vito Crew suffira amplement pour emmener les conducteurs d'engins sur un chantier : ses banquettes simplifiées et son plancher en médium sont conçus pour résister à tous les outrages.

Pour 33.970 euros, prix de la version d'entrée de gamme Function, on dispose des équipements de sécurité livrés de série sur toutes les Mercedes-Benz. A savoir antiblocage de roue, assistance au freinage d'urgence, antidérapage, deux coussins de sécurité, ceintures à trois points à toutes les places. A ce propos, si les sièges arrière sont si lourds à manipuler (au point d'y réfléchir à deux fois avant de les retirer), c'est en raison des renforts rendus nécessaires par l'intégration des enrouleurs de ceinture dans le dossier. Le prix à payer pour davantage de confort et moins de sangles emmêlées !

Le second niveau de finition "Trend" coûte 3.380 euros de plus. Il hérite entre autres du régulateur de vitesse, des fixations Isofix à l'arrière, de sécurité enfant aux portes arrière, de rétroviseurs électriques chauffants, d'une colonne de direction réglable sur les deux plans, de lève-vitres électriques à l'avant, et de sièges individuels en remplacement de la simple banquette trois places du Viano "Function".

La version la plus vendue en France ? "C'est bien simple", sourit Anne-Lise Castel : "Le profil type correspond à : un moteur Diesel — forcément — une peinture noire — à la rigueur gris métallisé — et une finition Trend ou Ambiente. A l'équipement de série, la plupart de nos clients ajoutent trois "packs" comprenant la peinture métallisée, le capteur de pluie, la porte latérale gauche, la climatisation automatique arrière, une septième voire une huitième place, la navigation GPS, la prise auxiliaire, le Bluetooth, le pré-équipement téléphone, une alarme et une glacière portable. Plus rarement la portière latérale gauche, la tablette repliable et le porte-vélo."

Des trois, la version "compacte" est la plus rare. Elle accueille autant de passagers que les "longue" et "extra-longue", mais pas assez de bagages pour satisfaire les gérants d'hôtels, particulièrement en station de ski.Côté motorisation, près du quart des acheteurs de Viano Monospace préfèrent le V6 CDI 3.0. Une proportion élevée qui en dit long sur leurs besoins et leurs exigences. En comparaison, 12 % seulement des exemplaires du cousin simple utilitaire, le Vito, ont droit au 6-cylindres.

En 2010, Mercedes-Benz n'a vendu que 606 exemplaires de Viano Monospace. "C'était une année charnière, avec le passage à la norme Euro 5 qui a pu retarder les livraisons", révèle Anne-Lise Castel. "Cette année toutefois, le total des livraisons dépasse les 650 exemplaires à fin juin. Une hausse sensible qui s'explique par les révisions apportées au Viano, par sa présence dans le réseau véhicules de tourisme et par l'absence de concurrence directe." Force est de reconnaître que, face à un Renault Trafic Passenger trop rustique et à un VW Multivan moins flatteur et moins puissant, le Viano Monospace reste le meilleur moyen de rouler utilitaire pour qui ne saurait souffrir paraître au volant d'un utilitaire.